« Au Japon, l’ivresse est associée à la sincérité, et l’individu ivre acquiert des droits à l’incongruité qui sont refusés à l’individu sobre. S’enivrer, c’est également se mettre à nu, se livrer complètement à ses partenaires de boisson, montrer sa vraie nature.
Malheur aux visiteurs que son éducation empêche de partager l’ivresse générale. Il sera taxé de sournoiserie… L’alcool donne accès au rêve. Dans une société où les rapports humains ont des bases plus subjectives que rationnelles, le flou apporté par la consommation d’alcool est un état où le rêve pénètre la réalité en fonction de l’univers même du buveur.
Pratique libératoire et probablement bienvenue puisqu’elle ne débouche apparemment que rarement sur des comportements agressifs. Le flou, cette interpénétration des fantasmes et de la réalité, semble en fait être un tranquillisant qui dissout les tensions de la vie professionnelle et sociale.
« L’alcool au Japon, Christian Worth France Japon Echo n° 21 (Images et réalités)
Une certaine tolérance de la société à la consommation d’alcool pour sa part festive et pour sa contribution à l’allégement de la pression sociale constitue un fond commun aux deux pays.
Parmi d’autres, les deux extraits suivants donnent un idée assez exacte de la résistance de chacun d’eux à aller plus loin dans les restrictions qu’imposeraient par ailleurs les exigences sanitaires et sécuritaires.
Pour la France « La consommation d’alcool est un sujet sensible, car l’alcool est associé aux événements festifs, aux modes de vie et à la culture. Cet héritage social et culturel, renforcé par des enjeux économiques, induit une tolérance générale vis-à-vis de la consommation d’alcool qui explique, pour une large part, la difficulté à définir et à mettre en œuvre une politique publique adaptée.”
Comme le disait très justement la Cour des comptes en 2016
Pour le Japon « Boire ou ne pas boire n’est pas une question morale, il n’y a pas d’interdiction religieuse de la consommation d’alcool et le mouvement de tempérance n’a jamais eu d’impact.
Traditionnellement, une certaine indulgence existe envers ceux qui boivent trop – et pour une bonne raison. Dans une société étroitement soudée où dissimuler émotions et frustrations est un élément hautement développé et nécessaire pour maintenir un «consensus», se saouler est une soupape de sécurité socialement acceptée.”
Selon Dave Milne, de la Canadian Medical Association, Consommation d’alcool au Japon: culture différente, règles différentes, 2002.
Comme en écho à ce qui précède, mais sous l’angle plus particulier du Japon, Moriyama Takashi écrivait dans son “Abécédaire du Japon” :
Un très grand nombre de mes compatriotes souffre d’une déficience génétique qui les rend allergique à l’alcool, et même ceux qui le supportent ne peuvent pas en boire de très grande quantité. Or, le problème est que même lorsqu’ils ne supportent pas bien l’alcool, ils en boivent bien au-delà de leur capacité d’absorption, entraîné par l’environnement de leur lieu de travail et surtout pour faire “comme tout le monde”.
Ainsi, dès 18h ou 19h, jusqu’au départ des derniers trains de banlieue, il n’est pas rare de voir des messieurs parfaitement distingués se donner en spectacle dans les états d’ébriété avancé sur les quais de gare. Certains boivent en petit groupe
dans des troquets que l’on trouve un peu partout, histoire de combattre le stress d’une dure journée de travail en cassant du sucre sur le dos de leur chef. Mais le plus éprouvant pour ceux qui ne peuvent pas boire, ce sont les banquets, qui sont fréquents aussi bien dans les entreprises que dans l’administration. Dans ces circonstances, les Japonais perdent tout leur sens de la réserve et se poussent mutuellement à ingurgiter de grandes quantités d’alcool.
Certains prennent très mal que l’on refuse la coupe qu’ils offrent, et si celui qui présente la boisson est un chef hiérarchique, il est encore plus difficile de refuser. D’aucuns prétendent que c’est en se soûlant à mort ensemble que l’on parvient à bien se comprendre. Ils considèrent que ces libations font partie de la vie professionnelle.
Jean Gérard Nay, ancien représentant d’Elf Aquitaine au Japon, dans son livre “Manager au Japon, un itinéraire” paru aux Editions L’Harmattan en 1994 renchérissait comme suit sur le sujet :
Dans les rues de Tokyo à la tombée de la nuit, lorsque les bureaux se vident, se pressent des groupes de “salary men”, parlant fort et faisant des grands gestes, allant boire quelques bières en dégustant tsumami ou nouilles ramen. Les langues se délient dans ces petits bars enfumés beaucoup plus librement qu’au bureau et les véritables problèmes avec les collègues, les employés, les clients, les partenaires, y sont exposés en détail. C’est dans ce cadre que l’employé confie ses difficultés personnelles et critique, en face-à-face, son supérieur et ses décisions.
Le fait d’aller boire avec des collègues et collaborateurs est au Japon un acte de gestion et de management comparable en importance au contrôle des stocks et du crédit client. Pour l’homme d’affaires étranger, c’est une pratique indispensable. Et plus que l’occasion de critiques et de remontrances, ce sera pour lui le moment de dire merci et bravo. Plus que dans d’autres pays, les Japonais sont sensibles à ces expressions de reconnaissance, car ils trouvent leur épanouissement dans le travail avec lequel ils entretiennent des rapports beaucoup plus affectifs que les occidentaux.
Et cet exutoire des pots le soir est une des façons d’être heureux au Japon.
Akira Mizubayashi pour qui, la langue japonaise favorise l’implicite au détriment de l’explicite, et surtout le respect des hiérarchies, écrit dans Petit Eloge de l’errance : « Il y a des moments où il devient nécessaire de libérer les paroles refoulées, celles étouffées par le poids de la hiérarchie distributrice de places. C’est là que le saké joue un rôle incomparable. Les buveurs, par la vertu d’émancipation de la potion qu’ils absorbent, donnent libre cours, dans une certaine mesure, à leurs sentiments habituellement dissimulés.
La médiation éthylique, universellement, pratiquée dans toute la société et à tous les niveaux, se montre efficace pour entretenir des liens supposés préexistants, cultiver la conscience de commune appartenance, désamorcer les dissensions à la racine, afin de maintenir la cohérence et la concorde. Les choses qui doivent être mises au clair le sont à cette occasion.
Les membres réunis pourront ainsi reconfirmer leur inscription dans le groupe, se reconnaître les uns par rapport aux autres dans leur destin commun ; à chacun est assignée une place, préalablement et structurellement déterminée d’où il convient de ne pas sortir. » Et c’est ainsi que la nuit ayant effacé les confidences du soir, il importe le matin suivant de n’en rien dire comme si dans un bon ou mauvais rêve il ne s’était rien passé.
Ceci posé, essayons d’y voir plus clair sur les contraintes qu’impose chacun des pays aux amoureux de la bonne bouteille. On les retrouve à tous les niveaux, de la vente à la consommation en passant par la promotion et bien sûr la conduite.
Vente libre mais pas tout à fait !
Sur la vente, chacun des pays part du principe que la consommation d’alcool peut être dangereuse et qu’il ne faut pas en laisser le commerce entre toutes les mains. Il faut aussi en protéger les mineurs.
C’est sur ces deux points qu’on trouve le plus de similarités entre les deux pays.
En France, la commercialisation d’alcool nécessite l’obtention d’une licence qui varie selon les modalités de la vente (consommation sur place ou vente à emporter), le type d’alcool vendu, le type d’établissement (débit de boissons ou restaurant). Chaque établissement est en outre soumis à un certain nombre de contraintes sur les conditions de sa commercialisation pour en limiter les excès. C’est ainsi que, le saviez-vous, un débit de boissons alcoolisées doit offrir à la vente par compensation au moins dix boissons non alcoolisées sur un étalage approprié.
Enfin, contrairement au Japon, la vente de boissons alcoolisées par le biais de distributeurs automatiques est interdite en France.
A cette différence près (qui est de taille il est vrai), le régime des licences est au Japon assez proche de celui de la France.
Au Japon, toute personne souhaitant se livrer à la vente de boissons alcoolisées doit obtenir une licence pour chaque emplacement de vente. De plus au motif notamment de la protection des mineurs, il n’est plus possible d’obtenir une licence exclusivement réservée à la vente de boissons alcoolisées dans des distributeurs automatiques.
La raison en est qu’en principe la délivrance d’une boisson alcoolisée doit se faire dans une boutique pour permettre au vendeur de vérifier l’âge de l’acheteur. Vous ne serez ainsi pas étonné de devoir confirmer sur l’écran de la caisse que vous avez plus de 20 ans quand bien même vous paraitriez avoir passé la cinquantaine. Mais rien n’arrête le progrès, la vérification de l’âge impossible aujourd’hui dans les distributeurs automatiques le deviendra lorsque répondant aux injonctions de la loi tous les distributeurs seront équipés de lecteur d’une pièce d’identité (qui n’opèrera qu’entre 5h et 18h).
En France, la vente ou l’offre à titre gratuit de boissons alcooliques à des mineurs est interdite dans les débits de boissons et tous commerces ou lieux publics. Il est en outre interdit de recevoir dans un débit de boissons un mineur de moins de 16 ans non accompagné d’une personne majeure.
La protection des mineurs a été accentuée par la loi santé du 26 janvier 2016 qui prévoit notamment l’introduction du délit de provocation directe d’un mineur à la consommation excessive d’alcool ou à la consommation habituelle d’alcool pouvant entrainer respectivement une condamnation à un an d’emprisonnement et au paiement d’une amende de 15.000 euros et, pour le second délit, deux ans d’emprisonnement et 45.000 euros. Les sanctions sont doublées lorsqu’il s’agit de mineur de moins de quinze ans.
Au Japon, comme évoqué plus haut, la consommation d’alcool par un mineur de moins de 20 est interdite. Nonobstant l’abaissement de l’âge de la majorité civile de 20 ans à 18 ans à partir du 1er avril 2022, la consommation d’alcool restera interdite au moins de 20 ans.
En cas de consommation d’alcool par un mineur, une amende administrative ou pénale est prévue, soit à l’encontre des parents qui ont laissé l’enfant mineur consommer de l’alcool (1.000 à 10.000 yens), soit à l’encontre du professionnel qui a vendu une boisson alcoolisée (jusqu’à 500.000 yens). Pour ce dernier, se voir infliger cette sanction constitue une des causes justifiant l’annulation de la licence de débit de boissons.
Une fois n’est pas coutume, le Japon est pour les amendes moins rigoureux dans les textes que ne l’est la France mais on peut s’attendre à ce qu’il le soit plus dans la répression.
Publicité oui mais pas trop !
Une même tolérance du côté japonais se retrouve dans la règlementation de la publicité pour les boissons alcoolisées.
La limitation des supports et du contenu de la publicité en France est plus stricte qu’elle ne l’est au Japon, C’est ainsi qu’en application de la loi Evin, les supports publicitaires autorisés sont limités à la presse écrite, la radio dans certaines tranches horaires, les affiches, les brochures commerciales, les inscriptions sur les véhicules de livraison, les fêtes et foires traditionnelles et les services de communications en ligne.
En revanche, la télévision n’est pas comprise dans les supports autorisés en France.
A l’inverse, elle l’est au Japon (sauf entre 5h et 18h) au même titre que les journaux, les magazines, les affiches, la radio, Internet, les brochures destinées aux consommateurs. Le support publicitaire doit cependant satisfaire aux exigences élaborées par l’organisation professionnelle régissant la vente des alcools qui impose d’afficher un message rappelant sur tous les supports que la consommation de l’alcool par un mineur est interdite.
En France les restrictions relatives au contenu de la publicité pour une boisson alcoolisée sur les supports autorisés sont exprimées en termes généraux. Ainsi un tel message publicitaire doit être informatif et se limiter à un certain nombre d’indications objectives telles que notamment le degré volumique d’alcool, la composition du produit et son mode de consommation.
Au Japon, les restrictions quant au contenu de la publicité pour une boisson alcoolisée restent aussi assez générales. Sont ainsi interdites les expressions pouvant conduire à une consommation excessive d’alcool ou à la dépendance à l’alcool ou encore les expressions incitant à conduire sous l’influence de l’alcool.
Enfin, en France comme au Japon, toute publicité doit être assortie d’un message précisant quel’abus d’alcool est dangereux pour la santé.
S’ajoute à ces règles, l’interdiction au Japon d’utiliser un mannequin âgé de moins de 25 ans et celle d’installer un panneau publicitaire de grande taille à moins de 100 mètres d’établissement d’enseignement (école, collège et lycée). Quant aux transports publics, toute publicité à l’extérieur d’un bus et d’un train est interdite.
A l’intérieur, en revanche, elle est autorisée sous réserve que des espaces soient dédiés à d’autres type de produits. Des mineurs ou des personnages ou personnalités susceptibles de les attirer ne doivent pas apparaître dans la publicité. De même, les logos ou les marques de boissons alcoolisées ne doivent pas être utilisés sur des vêtements, des jouets ou des jeux vidéo destinés aux mineurs.
Outre les règles légales exposées plus haut, il existe au Japon des normes volontaires intitulées « Normes volontaires concernant la publicité des boissons alcoolisées et l’indication sur les emballages de boissons alcoolisées ».
Elles ont été élaborées par un comité représentatif des huit associations du secteur des alcools, notamment la Japan Wines and Spirits Importers ‘Association 協会). Ces normes visent non seulement la publicité pour les boissons alcoolisées, mais également les indications sur les récipients contenant des boissons alcoolisées et des boissons non alcoolisées ayant un goût d’alcool. Bien que ces normes ne relèvent pas de la loi et ne sont donc pas obligatoires, tous les importateurs ainsi que les producteurs locaux sont tenus de les respecter.
Dans le contexte japonais, le non-respect de ces normes est en réalité impossible.
Un dernier verre pour la route ? A vos risques et périls !
La comparaison est-elle plus que d’autres révélatrice des différences culturelles entre les deux pays ? Ce qui suit permettra d’en juger.
Au Japon comme en France, la conduite en état d’ivresse est une des principales causes des accidents de la route les plus graves. En réponse à ce constat communément partagé, chacun des pays a cependant réagi par des mesures que chacun d’eux juge exemplaires, à ceci près qu’au vu des résultats, elles le furent bien davantage au Japon au point que le nombre d’accidents liés à l’alcool a été relégué à la dernière place tandis qu’il reste le premier en France.
Un regard plus attentif sur les mesures prises par chacun des pays s’impose donc pour mieux comprendre les causes d’une telle divergence.
Les deux pays ont instauré un régime de permis à points, la consommation d’alcool au volant étant une des infractions impactant le nombre de points et entrainant des sanctions à concurrence d’une plus ou moins grande quantité de points.
Les systèmes de permis à point de ces deux pays fonctionnement certes différemment pour aboutir à peu près au même résultat. En France le conducteur en perd, au Japon il en « gagne » avec pour conséquence ultime la privation du permis de conduire.
Ainsi, en France, un conducteur débutant obtient 6 points après avoir passé avec succès l’examen de conduite. Il gagne automatiquement deux points par an s’il ne commet aucune infraction au code de la route jusqu’à atteindre un maximum de 12 points. Il est susceptible de perdre des points en cas d’infraction au code de la route en proportion de l’importance de l’infraction.
Si le nombre de points tombe à 0, le permis est suspendu pour une période de 6 mois avec des possibilités de de récupérer des points sauf en cas d’invalidation automatiquement au bout d’un certain délai sans infractions ou via le suivi d’un stage de sensibilisation. A l’inverse au Japon, un conducteur part de 0 points et se voit infliger des points dont le nombre varie en fonction de la gravité de l’infraction, Ces points sont des points de pénalités, et donc plus il en obtient, plus il sera sanctionné.
S’agissant de la conduite sous l’emprise d’alcool, il ne faut pas être devin pour supposer que la loi française est très sensiblement plus laxiste que la loi japonaise.
En France les conducteurs expérimentés (titulaires du permis de conduire depuis plus de 3 ans), n’encourent aucune sanction si leur taux d’alcoolémie est inférieur à 0.5 g/l (soit 0,25 mg d’alcool dans un litre d’air expiré). Ainsi, les français peuvent boire environ deux verres de vin avant de prendre le volant. Entre 0.5 g/l et 0.8 g/l, un conducteur peut être condamné à une amende forfaitaire de 135 euros et perdre 6 points ainsi que l’immobilisation de son véhicule. Il peut aussi voir son permis suspendu pour une période de 6 mois à 3 ans.
Un taux d’alcool dans le sang supérieur à 0.8g/l constitue un délit routier et peut entrainer la condamnation du conducteur à 2 ans de prison, une amende de 4.500 euros, la perte de 6 points, l’immobilisation du véhicule, l’obligation de suivre un stage de sensibilisation à la sécurité routière aux frais du contrevenant et la suspension du permis de conduire jusqu’à 3 ans.
En parallèle, depuis 2018, le préfet ou le juge selon le cas peut imposer l’installation d’un éthylotest anti-démarrage comme possible alternative à la suspension du permis de conduire en cas de conduite sous l’emprise de l’alcool. Et pour ceux qui qui souffrent de pratiques addictives liées à l’alcool (dite « alcoolodépendant »), il peut leur être imposé en plus de se soumette à un suivi médico-psychologique dans une consultation d’addictologie.
Au Japon, la conduite en état d’ivresse peut être divisée en deux catégories : sakeobi unten et sakeyoi unten. La première fait référence au taux d’alcool dans un litre d’air expiré alors que la deuxième fait référence à l’état d’ivresse physique apparent du conducteur, tel que difficultés d’élocution, difficultés à garder son équilibre, troubles de la vision, etc. Si un test d’alcoolémie révèle que le conducteur a un taux d’alcool situé en 0.15 mg/l et 0.25 mg/l d’alcool dans un litre d’air expiré (soit un verre de vin) il encourt jusqu’à 3 ans de prison, une amende de 500.000 yens et 13 points de pénalité. Ces sanctions sont relevées à 25 points de pénalité si le taux est supérieur
à 0.25 mg/l. O
Outre les différences de degré d’alcool et de montant des amendes, une autre différence significative est qu’au Japon une peine de prison est encourue après le premier verre alors qu’en France une telle sanction n’intervient qu’à partir de 0.8 g/l (soit 0,40 mg d’alcool dans un litre d’air expiré) équivalent à plus de trois verres. Concernant la conduite en état d’ivresse (sakeyoi unten), celle-ci peut être punie jusqu’à 5 ans de prison et une amende de 1,000,000 yens et 35 points de pénalité. De plus, dans le système japonais, le conducteur n’est pas le seul à être sanctionné. Les tiers qui n’ont pas empêché le conducteur de prendre le volant après avoir consommé de l’alcool peuvent l’être également.
Ainsi une personne qui fournit un véhicule au conducteur qui a consommé de l’alcool ou qui va probablement conduire sous l’influence de l’alcool peut être sanctionnée par des peines allant jusqu’à 5 ans de prisons et une amende de 1.000.000 de yens. De même, celui qui fournit des boissons alcoolisées au conducteur ou qui l’encourage simplement à en consommer alors qu’il y a une haute probabilité que le conducteur prenne le volant ensuite, encourt les sanctions suivantes peut être sanctionné par des peines allant jusqu’à 3 ans de prison et une amende de 500.000 yens.
Enfin, et c’est là une différence encore plus notable, les passagers présents dans la voiture au moment où le conducteur a été arrêté encourent également des sanctions s’ils sont eux-mêmes titulaire du permis de conduire par des peines variant de 300.000 à 500.000 yens et de 2 à 3 ans de prison.
Comme on s’en doute au vu du niveau de sanction de chacun des pays, les résultats de la lutte contre l’alcool au volant sont pour le moins contrastés.
En France, l’alcoolémie compte pour 31% des accidents mortels, la vitesse venant ensuite à 25%, puis la fatigue ou la somnolence à près de 8% des accidents mortels. Il est vrai qu’en France la consommation de stupéfiants est souvent associée à celle de l’alcool, facteur aggravant que ne connait quasiment pas le Japon.
Au Japon l’alcoolémie ne compte plus que pour 0,3% des accidents mortels contre 28% pour l’inattention, 13% pour des fausses manœuvres et 4% pour les excès de vitesse Il n’est pas sans intérêt de souligner que le renforcement des sanctions n’a pas freiné la consommation générale d’alcool au Japon.
En revanche il a eu pour conséquence une réduction substantielle de l’usage privé de la voiture (conjointement avec une répression plus rigoureuse du stationnement irrégulier associé à l’obligation pour tout propriétaire d’une voiture de disposer d’un parking).
Au vu de l’ensemble des mesures prises par chaque pays pour lutter contre les excès de l’alcool, on constate que pour l’essentiel les différences priment sur les similarités. Le Japon est sensiblement moins contraignant sur la vente mais plus rigoureux sur la consommation des mineurs, plus laxiste sur la publicité mais très substantiellement plus sévère sur la conduite sous l’emprise de l’alcool.
Au final, du point de vue de la prévention, sa performance est meilleure que la France avec une moindre consommation par habitant, 8 litre pour le Japon en 2016 contre 12,6 pour les français (sauf à mettre cette différence sur l’intolérance à l’alcool de nombreux japonais due à la déficience génétique évoquée plus haut), et surtout, comme on l’a vu, moins de décès au volant pour cause d’alcoolémie.
Nul doute que pour les amoureux de la bonne bouteille le temps pas si lointain du « petit dernier pour la route » est bien révolu.